PME : Pourquoi les réseaux sociaux ne vous sauveront pas

DISCLAIMER : Si vous pensez que les réseaux sociaux sont un canal complémentaire à votre communication globale et que vous n’en attendez pas des miracles, vous pouvez vous dispensez de lire cet article (mais merci d’être passé ;)).

C’est bientôt la rentrée, le temps des « compètes » sur lesquelles les agences vont se battre pour décrocher THE budget annuel qui va leur garantir un revenu récurrent. Gageons qu’une fois encore, on va vendre, revendre, survendre du community management, auquel on aura mis une couche de vernis plus professionnel, moins galvaudé, du genre « Social media strategy » ou « Engagement marketing ».

On va redire à des entreprises au budget trop court pour investir en média que les réseaux sociaux permettent de créer de la rumeur positive, favorisent l’engagement de leurs consommateurs / bleekin / prospects, génèrent du retour sur engagement, voire même du retour sur investissement, pour peu qu’ils investissent dans des outils de ‘monitoring réputationnel’ ou de ‘conversation analytics’.

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Oui, mais non.

Je vais encoooore me tirer une balle dans le pied (ça va pas être joli dans les tongs) et me faire détester des professionnels de la profession, mais non, non non et re-non.

Un exemple : cliente insatisfaite à la Barclays Bank, ignorée pendant 2 ans par des chargés de compte, directeurs d’agence et autres stagiaires incapables de procéder aux opérations bancaires les plus simples et de répondre à mes mails, je me suis retrouvée la semaine dernière dans une situation ubuesque de comptes toujours pas fermés, de cartes bleues renouvelées et facturées, un an après avoir (du moins le pensais-je) bouclé les formalités de fermeture de comptes.

J’ai tenté une ou deux saillies sur Twitter et via mon blog personnel, rien. Quelques RT, des citations de la marque et rien.

Et ça n’a rien d’étonnant. Comment peut-on imaginer qu’une entreprise de services bancaires qui visiblement a mis de coté le sens du service, justement, et fait l’impasse sur la gestion de la relation client soit efficace sur les réseaux sociaux ? Ils ont tellement à faire en formation, process et outils pour améliorer la qualité de leur service que la nécessité d’être réactifs sur les réseaux sociaux ne leur apparait pas forcément évidente, au vu de l’ampleur de la tâche (et vu le nombre d’internautes mécontents que j’ai croisés sur les forums :)).

Si la Barclays Bank me fait l’effet d’une vieille anglaise décatie nostalgique de l’époque victorienne, je doute que ce soit son ‘absence’ sur les réseaux sociaux qui entraîne sa perte. Eventuellement son incapacité à satisfaire des bleekin exigeants, son manque d’organisation, ses dysfonctionnements, mais pas le fait de ne pas avoir embauché une armée de community manager.

Parce que les réseaux sociaux ne sauveront personne.

Les réseaux sociaux ne sauveront pas les entreprises en difficulté financière, a fortiori si ces difficultés sont consécutives à des erreurs de gestions, des problématiques de marché ou de conjoncture.

Les réseaux sociaux ne sauveront pas les petites entreprises en mal de trésorerie à la recherche de la solution miracle pour se faire connaître.

Les réseaux sociaux ne sauveront pas les moyennes ou grandes entreprises qui ont oublié que leur unique raison d’être est la conquête, la satisfaction et la fidélisation de leurs bleekin.

Une présence active et efficace sur les réseaux sociaux ne peut pas être le fait d’une agence qui monte une belle stratégie et la fait mettre en oeuvre par une escouade de community managers, si talentueux soient-ils.

Une présence active et efficace sur les réseaux sociaux implique que l’entreprise porte déjà en elle au moins l’embryon du « sens du client », que l’ensemble de la chaine de valeur repose sur la qualité du produit ou du service et que la satisfaction client soit au centre de ses process, de ses méthodes et des préoccupations de la direction et du personnel.

Je reprends un autre exemple. Cliente habituelle d’IdTGV, j’ai eu l’occasion de voyager en 1ère classe sur un TGV standard à plusieurs reprises. Quelle déception… Les salariés sont beaucoup moins souriants et dynamiques, les wagons auraient besoin d’un coup de déco, la propreté des toilette est digne d’une cabine sanitaire de plage à l9h, bref, le choc est rude (surtout quand on voit la différence de prix).

Et quand j’ai twitté la semaine dernière sur des problèmes d’impression d’un billet IdTGV commandé sur le site de la SNCF, devinez qui est intervenu pour me dépanner tandis que le second est resté silencieux ?

J’ignore tout de la santé financière et de la prospérité d’IdTGV. Ce que je sais, c’est que ce n’est pas leur présence sur les réseaux sociaux qui les sauvera, mais bien toute l’attention portée en amont au ‘service client’, depuis l’acquisition à la fidélisation, par les différents services, grâce à de nombreux process mis en place (comme par exemple l’envoi automatique d’un bon de remboursement en cas de retard conséquent, un outil de CRM simple mais efficace, une hotline accessible et sympathique, des barista qui disent bonjour et tout un tas de détails dont la mise en place sort des attributions d’une agence de social marketing mais rentre très bien dans les attributions de certains cabinets de conseil en organisation ou stratégie).

Alors OUI, il faut explorer les réseaux sociaux, s’approprier les outils, mettre en place une écoute attentive et les utiliser comme un baromètre réputationnel. OUI, il faut mettre en place une stratégie, au moins pour anticiper une crise éventuelle et essayer de faire des réseaux sociaux une « occasion d’être vu » supplémentaire, un canal de communication complémentaire, un lieu d’échange avec son écosystème.

Mais toutes les couches de vernis social dont vous enjoliverez vos actions de communications ne suffiront pas, si vous n’insufflez pas dans toute l’entreprise une dynamique customer-centric et que vous ne vous en donnez pas les moyens financiers et organisationnels pour qu’au final, votre réussite sur les réseaux sociaux découle, tout simplement, de la qualité de vos produits, de vos services, de vos relations bleekin.

Alors, prêts pour le changement en 2012 ? 😉

 

 

Sophie

Ex DirCom devenue Coach en nutrition après 20 ans à naviguer dans le secteur digital, je partage ici mon quotidien d'entrepreneure nomade. #minimalism #slowlife #geek

Pas de réponses

  1. Xav dit :

    Il y a un mot qui compte : stratégie. Mais avant de penser stratégie social media, strat Mktg, strat RP, strat Com, strat client… Il y a celle de l’entreprise à établir. Les autres sont au service du projet Entreprise.
    Et surtout, il faut qu’il y aie une réalité entre les discours et les faits !

    Enfin j’veux dire que je suis d’accord avec toi !
    Pas de miracle, quelque soit la discipline, si les preuves ne sont pas là, si le discours ne correspond pas à la réalité.

  2. Thomas Pichon dit :

    Merci Sophie pour cet article très bien rédigé.
    On pourrait difficilement imaginer qu’une entreprise type la Barclays puissent à court terme être mise en péril à cause de son manque de « customer centricity ». Et pourtant… Toujours au Royaume-Uni, la start-up GiffGaff dans le secteur de la téléphonie est en train de prendre des parts de marché considérables aux géants Orange, T-Mobile and co… Un bel exemple d’une entreprise qui a tout compris ! Plus d’info ici : http://thecustomerevolution.blogspot.com/2010/12/giffgaff-case-study-of-customers-in.html

  3. Fays dit :

    Excellent article Sophie, et j’adhère complètement à tes propos.

    Je ne suis pas spécialiste social media, ce n’est pas mon métier et je n’oserai pas me qualifier en tant que tel.

    J’interviens en stratégie d’entreprise, et à ce titre, me permets de donner des recommandations sur les directions à prendre, mais pas en social media. 😉

    Ce qui m’étonne dans les articles que j’ai pour habitude de lire, c’est la manière dont on vend les social medias, un peu comme un cours à Hogwarts. Il suffit d’apprendre la formule magique, et résultat est garanti. Veille, discussions, présence et image positive. Mais pour beaucoup d’entreprises, cela ne veut rien dire, et ne changera pas grand chose si les problèmes de fond ne sont pas définis, et surtout si la stratégie de l’entreprise globale ne va pas dans ce sens.

    Je vois également de manière récurrente une expression qui revient qui est: « Le ROI n’est pas important, c’est votre image qui l’est ». Certes. Mais une entreprise n’investira que sur des choses qui ont un retour sur investissement. Donc quelque chose de mesurable, et pour lequel on voit des retombée directe (Augmentation du nombre de bleekin, augmentation de la satisfaction de ces derniers, augmentation du taux de transformation….).

    Les entreprises ont d’abord un besoin de vendre, de s’établir sur des marchés, de lancer de nouveaux produits. Les médias sociaux ne pourront les aider que si tout le reste est positionné de manière appropriée.

    Beaucoup d’entreprises ont commencé à embrasser leur stratégie socme en 2008, notamment depuis le début de la crise financière. A un horizon de trois ans, elles pourront faire un point pour bien déterminer ce qui leur convient, et ce qui ne l’est pas.

  4. barthox dit :

    Entièrement d’accord avec vous!

    Et a l’inverse, je pense que s’ils ne vous sauveront pas, il ne vous tueront pas nécessairement non plus … => http://barthox.wordpress.com/2011/06/24/diabolisation-du-bad-buzz/

  5. Sophie Guin dit :

    C’est bien là le problème : les entreprises qui se lancent à corps perdu dans les réseaux sociaux sans comprendre qu’il faut d’abord se restructurer en interne. Le personnel de l’entreprise doit être sensibilisé à tout cela et, bien sûr, si le sens du client n’est pas déjà au coeur de la stratégie, il serait effectivement temps de s’y mettre. Car sur les réseaux sociaux, tout tourne autour du client, pas de la marque !

  6. En somme, même pour les réseaux sociaux, l’habit ne fait pas le moine… surtout si l’on veut griller les étapes en mettant la charrue avant les boeufs 😉