« Je suis toujours grosse dans ma tete »
Cette phrase surgit régulièrement, au détour d’une conversation, quand j’aborde avec mes amis mon combat quotidien.
Aujourd’hui, j’ai la silhouette d’une fille ‘bien en chair’ et sincèrement, je m’en contenterais si j’étais assurée de ne plus jamais prendre un gramme. Mais je sais que c’est impossible, que tant que mon endocrino n’aura pas trouvé l’équilibre médicamenteux nécessaire à mon organisme (si elle y parvient un jour), je devrais trouver moi même l’équilibre alimentaire nécessaire.
Et ma lubie de perdre encore ces 5kg qui me pèsent n’en est pas une, mais plutôt l’envie, le besoin, d’atteindre un poids auquel je tolère mon reflet dans la glace, je rentre dans les vêtements qui me plaisent et je ne souffre plus, physiquement, de ma ‘surcharge pondérale’.
Bref, je suis toujours grosse dans ma tête.
Je m’en rends compte régulièrement lorsque j’essaie de nouveaux vêtements, persuadée que je n’y rentrerai jamais avant de découvrir que j’ai visé trop grand… Quand je gare ma voiture dans un emplacement un peu rikiki et que je soupire à l’idée d’avoir à me contorsionner pour sortir, alors que finalement ‘ça passe’… Quand je crois mon reflet dans une glace et que je ne me reconnais pas, encore surprise, 3 ans plus tard, d’avoir fondu de plus de 35kg.
Et je crois que mes egotrips photographiques, mes autoportraits réguliers, sont un moyen de me ‘connaitre’, de me ‘voir’ autrement que dans ma glace, à la lumière blafarde de ma salle de bain. Parce que clairement, ce reflet là sera toujours trop gras, trop flasque, trop vergeturé, trop capitonné pour moi.
Aujourd’hui, je sais que je suis malade, une maladie mortelle qui s’appelle l’obésité. Je ne suis pas grosse comme la plupart des gens qui, une fois installés dans une vie plus sédentaire façon ‘métro boulot dodo’, chargent 5 à 10kg de plus et stabilisent quoi qu’ils mangent.
Je souffre d’un dérèglement hormonal qui entraine une prise de poids régulière et continue, même avec une alimentation hypocalorique équilibrée. Et il faut que je vous dise, c’est la plupart du temps le cas des gros, qui ne sont pas tous gros parce qu’ils se goinfrent plus que vous.
Aujourd’hui, je suis toujours grosse dans ma tête et les premières pensées de ma journée se tournent vers la nourriture, non pas par obsession boulimique mais parce que me nourrir ne sera jamais simple et qu’il faut prévoir, anticiper, préparer pour ne pas être tentée, pour ne pas se retrouver dans une situation à risques.
Aujourd’hui, mon premier geste du matin est de monter sur ma balance, de mesurer mon tour de taille, de cuisse et de hanche, d’avaler mon Levothyrox et de remplir mon compte rendu quotidien. Pas par plaisir ou par masochisme, non, juste parce que chaque jour qui passe est une victoire de plus, et que de la même manière qu’un général passe ses troupes en revue chaque matin, je vérifie que je suis sur la bonne voie.
Alors oui, je suis et je resterai grosse dans ma tête. Même en rentrant dans du 40. Parce que si je n’étais plus grosse dans ma tête, cette vie ne serait juste pas acceptable.